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Youssera El Archi, docteure en mécanique : récit d’une belle aventure de thèse.


Youssera El Archi
Youssra El Archi

Merci d'avoir accepté l'interview.


Quel a été ton parcours et comment en es-tu venue à faire une thèse ?

J’ai eu un parcours scolaire relativement classique dans une petite ville du Loiret, en sortant de lycée je ne savais pas encore ce que je voulais devenir j’avais juste un attrait pour les sciences… Je me suis donc dirigée vers une CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles) car cela restait pluridisciplinaire. Après avoir réalisé mes 2 ans de CPGE à Orléans, j’ai intégré une école d’ingénieurs généraliste à Brest où je me suis spécialisée dans la modélisation et la mécanique des matériaux.


En fin de cursus, on part pour un stage de 6 mois : je me rappelle avoir mis du temps à trouver mais j’ai fini par en avoir un grâce à un de mes professeurs et ses contacts en entreprise (encore merci à lui). J’ai effectué mon stage au sein d’un site de R&D sur les matériaux composites d’un grand groupe aéronautique français. Il s’agit d’un site relativement petit (100-110 personnes) où j’y ai découvert tous les métiers du composite et une richesse de profils unique : j’ai travaillé avec des ingénieurs réalisant le dimensionnement de structures en composite, des techniciens d’essais en caractérisation mécanique ou encore en observations microscopiques. Enfin bref c’était une période très stimulante où j’étais entourée de personnes passionnées par ce qu’elles faisaient au quotidien.


En échangeant avec les ingénieurs, je me suis rendu compte que la plupart étaient "docteurs" , mot un peu vague pour moi à l’époque mais qui me faisait ressentir de l’admiration pour ces personnes. J’avais entendu parler de la possibilité de faire une thèse de doctorat en école d’ingénieurs mais je ne voyais pas concrètement en quoi ça pouvait consister. À vrai dire je voyais ça réservé aux personnes « surdouées », je n’ai jamais été mauvaise à l’école mais je n’ai jamais été la « meilleure » non plus donc je n’envisageais pas forcément cette option.


Arrivée en fin de stage, un ingénieur (coucou Bastien) m’a proposé un sujet de thèse. Là, il fallait que je me décide alors j’ai essayé de récolter le plus de témoignages possibles auprès des personnes ayant fait un doctorat, toutes très heureuses qu’on leur demande d’ailleurs !   "C’était quoi ton sujet ?", "Tu étais bien encadré ? ", "Tu travaillais beaucoup tout.e seul.e ? ", " Qu’a été le plus difficile ? " (La rédaction du manuscrit bien-sûr).  Ce qui m’a le plus rassuré étaient les retours positifs que j’ai collectés et l’enthousiasme avec lequel les ingénieurs parlaient de leur sujet (presque avec un peu de nostalgie). Le soutien de ma famille a fini de me convaincre et je me suis donc lancée dans l’aventure.


J’ai donc réalisé une thèse CIFRE entre cette dite entreprise et le Laboratoire de Mécanique et d’Acoustique à Marseille. Mon sujet portait sur la caractérisation et la modélisation des matériaux élastomère pour amortir des structures composites.


Que retiens-tu de tes années de thèse ? Quelles leçons as-tu apprises ?

Premièrement je retiens l’importance d’un bon encadrement, j’ai eu la chance d’être très bien encadrée par deux co-directeurs de thèse au laboratoire et d’avoir eu également deux encadrants en entreprise. Je voyais mes directeurs de thèse régulièrement et on pouvait échanger sur mes avancées ou mes points bloquants. Au laboratoire, j’ai également côtoyé des ingénieurs de recherche passionnés qui sont toujours enthousiastes à l’idée de partager leurs travaux ou d’aider à résoudre des problèmes scientifiques. Je retiens également l’entraide entre doctorants qui peut s’avérer essentielle.  


Ces trois années furent très formatrices d’un point de vue technique mais aussi d’un point de vue management et connaissance de soi. D’un point de vue technique, on apprend (et comprend) de nouveaux concepts, de nouvelles théories et on utilise des nouveaux outils. J’ai eu la chance d’avoir un sujet très riche à la fois basé sur des aspects numériques et expérimentaux : j’ai donc acquis des connaissances dans ces deux domaines. La diversité des concepts à explorer est ce qui m’a permis de rester motivée tout du long. J’en viens donc à insister sur l’importance d’avoir un sujet qui nous convienne et qui nous intéresse car on s’engage à travailler trois années complètes dessus.


D’un point de vue humain, on développe son autonomie, sa réflexion mais aussi sa capacité à communiquer ses résultats tout en gagnant un peu de confiance en soi (ce qui m’a toujours fait défaut). En fin de thèse, la période de rédaction du manuscrit est une période très intense qui peut être un peu stressante. Avec le recul, je vois la thèse comme un marathon où la rédaction du manuscrit représente le « sprint » final avant la ligne d’arrivée: on a déjà fait 90% du travail alors on se canalise et on donne ce qu’il reste pour finir en beauté (ou pour finir tout court). Personnellement, penser à la fierté que j’allais avoir après m’a permis d’avancer assez sereinement dans cette phase. La thèse représente pour moi 3 années très stimulantes durant lesquelles j’ai développé à la fois mes compétences techniques et mes connaissances sur moi-même finalement.


Quel poste occupes-tu aujourd’hui ?

Après la thèse, j’ai commencé un poste d’ingénieure R&D en mécanique au sein de l’entreprise qui a financé ma thèse. Je travaille encore en partie sur des technologies liées à mon sujet de thèse mais j’ai aussi des sujets nouveaux que j’ai découvert sur le terrain ! J’ai des journées très stimulantes et je continue d’apprendre ce qui est essentiel pour moi.


Un mot de la fin ?

Je n’en ai pas parlé plus haut car cela n’a absolument pas impacté le déroulé de ma thèse mais je me permets une remarque ici. Je suis une femme qui travaille dans le domaine de la mécanique et, même si c’est de moins en moins le cas, j’ai fait toutes mes études entourées à 80% d’hommes. Je pense que cela a dû avoir une influence sur mon comportement et peut-être sur ma confiance en moi. Mais une chose que l’on apprend quand on fait des sciences c’est qu’on ne doit jamais juger sans preuves. C’est pourquoi être une femme dans ce milieu ne m’a jamais posé de problèmes car j’ai mérité ma place comme tout le monde. Alors je pousse toutes les étudiantes, peut-être en manque de confiance en elles, qui voudraient poursuivre des études scientifiques et/ou faire une thèse à le faire car vous en avez les capacités et on ne devrait jamais vous faire ressentir le contraire. Faites de vos particularités une force !

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