Pouvez-vous nous raconter le parcours qui vous a mené à cette aventure ?
Merci beaucoup ! Eh bien, je suis né à Grenoble il y a un peu plus de vingt ans [sourire], et dès mon plus jeune âge, j'ai toujours été partagé entre deux passions : le sport et les sciences. J’ai grandi avec cet amour pour les deux domaines, et après le bac, je me suis retrouvé à la prépa des INP à Grenoble en tant que sportif de haut niveau en tennis de table. C’est là que j’ai découvert l’exigence qu’implique un double cursus. Gérer les entraînements intensifs tout en réussissant académiquement m’a beaucoup appris sur les sacrifices nécessaires pour réussir. Mais c’est aussi à ce moment que j’ai découvert le monde des matériaux, ce qui a été une révélation pour moi.
Je me suis donc dirigé naturellement vers PHELMA, l’école d’ingénieur spécialisée dans les matériaux, toujours en tant que sportif de haut niveau. C’est surtout ma dernière année le game changer car lors de mon stage de fin d’études au laboratoire SIMAP, j’ai découvert le monde de la recherche. J’ai bien accroché et j’y suis resté trois ans supplémentaires pour y réaliser ma thèse.
On pourrait donc dire que faire une thèse était un choix planifié ?
Pas du tout [rires]. À la base, j’avais choisi ce stage pour son sujet sur la fabrication additive des alliages d’aluminium, avec l’idée de poursuivre une carrière d’ingénieur dans ce domaine. Mais à la fin de mon stage, le projet Aéroprint a financé une thèse pour poursuivre le développement des alliages, et je me suis dit que je ne pouvais pas passer à côté de cette opportunité. En fait, ce qui m’a poussé à accepter c’est surtout ma curiosité et mon sens du défi : je voulais prouver à moi-même que je pouvais répondre aux questions qu’on se posait avec mes encadrants.
Alors, avec du recul, est-ce que c’était un bon choix de poursuivre en thèse ?
Sans doute le meilleur choix de ma vie [rires]. Je me retrouve à étudier un nouveau matériau sur une nouvelle technologie. Je repousse mes limites dans tous les domaines que j’avais abordé en école d’ingénieur : la solidification, précipitation, propriétés mécaniques à température ambiante et haute température. Mais ce qui a vraiment fait de cette expérience une aventure humaine, c’est l’équipe qui m’a entouré, notamment trois personnes : Patricia Donnadieu, Jean-Jacques Blandin et mon directeur de thèse, Guilhem Martin. Grâce à eux, j’ai non seulement appris sur le plan scientifique, mais aussi sur le plan humain. Aujourd’hui tout ce que j’ai pu apprendre grâce à eux, que ce soit scientifique ou humain, je le mets en œuvre en tant que post-doctorant à l’EPFL.
Vous semblez vraiment passionné par cette expérience. Pour ceux qui hésitent, comment conseillez-vous de choisir une thèse ?
Je dirais que c’est d’abord des rencontres, des gens qui m'ont tendu la main pour paraphraser une célèbre tirade. Blague à part, le choix d'une thèse est principalement une question d’environnement humain. Je dirais que c’est 70 % les personnes avec qui vous allez travailler et 30 % le sujet. Il est essentiel de bien connaître votre futur directeur de thèse et de parler avec lui pour vous assurer que vous allez bien vous entendre. C’est aussi une bonne idée de vous renseigner sur le groupe de recherche et l’ambiance générale du laboratoire. Quant au sujet, il est important qu’il vous passionne, car dans les moments difficiles, et il y en aura, c’est cette passion qui vous motivera à continuer.
Votre motivation a clairement porté ses fruits puisque vous avez gagné le 1er prix Bodycotte 2024. Félicitations ! Quels sont, selon vous, les secrets d’une thèse réussie ?
Merci ! Pour moi une thèse ne s’évalue pas sur les prix ou les articles que nous écrivons mais sur le parcours que nous réalisons. J’ai toujours eu le syndrome de l’imposteur et ma thèse m’a permis de me prouver à moi-même ce dont j’étais capable. Et souvent on est surpris !
Si je devais résumer ce qu’est un "bon" doctorant, je dirais que c’est d’abord quelqu’un qui vise l’excellence. Trop souvent, on oublie que la thèse est le diplôme scientifique le plus élevé, c’est une quête de savoir. Ensuite, il faut être passionné, presque obsédé par la recherche, avec ce besoin viscéral de comprendre. Cette passion est ce qui vous portera dans les moments difficiles. Et, bien sûr, il faut être résilient, pour ne pas abandonner lors des moments difficiles … et il y en aura forcément [rires]. Enfin, même si je n’en suis pas le meilleur exemple [rires], il faut savoir être raisonnable pour garder l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.
En résumé, vous diriez que la thèse est bien plus qu’un travail scientifique, c’est une aventure humaine et une quête d’excellence ?
Exactement ! Avec les bonnes personnes autour de vous, une passion pour le sujet et de la résilience, la thèse devient une expérience de vie inoubliable. C’est un défi, mais il en vaut la peine.