Merci beaucoup pour votre interview.
Pourquoi avez-vous démarré un doctorat avec l’ED SPI ?
Avant de me lancer dans ma thèse, j’ai fait une école d’ingénieur généraliste (Mines de Paris - 2012-2015) puis j’ai travaillé 1 an avec l’Université de Bordeaux. Durant cette année, j’occupais un poste assez généraliste en tant qu’ingénieur d’affaires / chef de projet sur des thématiques de transfert technologique en santé numérique dans la recherche académique. Je me suis rendu compte que les sujets techniques et scientifiques me manquaient, mais qu’en tant que généraliste je n’étais pas assez expert pour travailler directement sur un poste de ce type.
A l’époque poursuivre après une grande école d’ingénieur sur un doctorat était assez rare. Les écoles d’ingénieurs sont très valorisées en France et le doctorat était relativement sous-valorisé. La tendance commençait tout juste à s’inverser et je voyais beaucoup de camarade de promo partir sur cette voie et s’éclater. J’ai décidé de faire pareil, pas forcément dans une stratégie personnelle long terme mais plutôt pour me faire plaisir à faire de la science.
Je discutais dans le cadre de mon travail avec des professeurs en STAPS qui voulaient monter une équipe de recherche sur de l’analyse de données cardiaques et biomécaniques en physiologie (Pr. Laurent ARSAC, Pr. Véronique DESCHODT-ARSAC). On a en même temps monté l’équipe (Equipe PMH_DySCo, dans le groupe cognitique de l’IMS, UMR 5218) et lancé le projet de thèse. On était en parallèle en échange avec le CATIE (Centre Aquitain des Technologies de l’Information et Electroniques) qui s’intéressait à l’évaluation d’états cognitifs via des mesures physiologiques, et on a donc lancé la thèse CIFRE en 2017 en co-encadrement IMS/CATIE.
Quel était le sujet de votre doctorat ?
Mon sujet de thèse exact était l’ “Analyse non-linéaire de la dynamique des systèmes complexes de contrôle physiologique pour évaluer performance et santé chez l'Homme connecté en situation écologique”. Concrètement, j’ai mis en place des protocoles expérimentaux et conçu des méthodes d’analyse du signal. L’objectif était d’évaluer l’impact d’activités cognitives sur le contrôle autonome (involontaire) cardiaque (variabilité du rythme cardiaque), postural (stabilisation de la position debout), et locomoteur (rythme de marche, de pédalage).
J’ai soutenu ma thèse et obtenu mon doctorat fin 2019.
Quelques analyses de mon doctorat
Quel a été votre parcours après le doctorat ?
Vers la fin de mon doctorat j’ai commencé à me poser la question : “et après, qu’est-ce que je fais ?”. Je n’avais pas spécialement envie de continuer sur un postdoc, et pas forcément l’ambition de devenir enseignant-chercheur. Je ne trouvais pas non plus d’entreprise dans les thématiques qui m’intéressaient.
Je me suis donc inscrit à UBeeLab, l’incubateur étudiant de l’Université de Bordeaux, en même temps que mon doctorat (2018-2019) dans l’optique de créer ma propre société.
Au départ, j’avais pour idée de fabriquer et commercialiser des ceintures cardiaques connectées à destination des sportifs de haut niveau. Le CATIE m’a accompagné jusqu’au prototypage du projet. Finalement, j’ai décidé de concevoir une application pour accompagner les coureurs dans leur programme. Le produit permettrait d’analyser automatiquement des données d’entraînement afin de proposer un plan individualisé, avec des séances spécifiques adaptées au niveau des coureurs.
J’ai été accompagné à la suite d’UBeeLab par Unitec (incubateur régional) et Inria Startup Studio. C’est là que j’ai rencontré mon futur associé Aurélien Appriou, qui finissait son doctorat.
La société Flit Sport a été légalement créée en 2021 et compte aujourd’hui 9 collaborateurs. La première version de l’application est sortie, un brevet est en cours de rédaction sur l’individualisation de l’entraînement, et les premières commercialisations auront lieu dès l’été 2022.
L’application Flit Sport donne accès à des plans d’entraînement de running individualisés
En quoi le doctorat sert votre parcours?
Le doctorat a eu de gros impacts sur le développement de mon projet d’entreprise. C’est ma connaissance du milieu du sport via l’expérience en STAPS, l’apprentissage de la physiologie du sport dans mes sujets de recherche et l’expertise en analyse de données physiologiques, qui m’ont permis de me lancer sur le sujet.
Au démarrage du projet j’étais seul et j’ai donc travaillé sur les premiers démonstrateurs de l’application de programmes d’entraînement. Ces démonstrateurs m’ont permis de convaincre Aurélien de rejoindre le projet début 2021 en tant que CSO (Directeur Scientifique). Par la suite nous avons été rejoints par un troisième associé CTO, Mickaël, et par une réelle équipe en R&D.
Aujourd’hui je continue d’encadrer chez Flit Sport une partie la recherche en physiologie du sport et l’analyse de séries temporelles. En parallèle, je capitalise sur ces connaissances pour améliorer l’application, développer de nouvelles fonctionnalités innovantes sur l’individualisation de l’entraînement par rapport aux données de chacun.
En plus de m’avoir permis de développer ces expertises, le doctorat apporte de plus une validation et une reconnaissance officielle de mon expertise sur le sujet, qui rassure les partenaires, collaborateurs, investisseurs et les autres parties prenantes.