
Moustache non contractuelle...
Merci beaucoup pour le témoignage.
Quel est ton parcours et pourquoi avoir choisi de faire une thèse ?
Je vais commencer par dire que je ne voulais pas faire de thèse car je considérais que ce n’était pas nécessaire pour devenir ingénieur.
Sans trop rentrer dans les détails, je ne savais pas trop quoi faire après le lycée donc j’ai fait deux ans de prépa Maths-Physique. Je ne savais pas trop quoi faire après la prépa donc je suis allé dans la meilleure école qui a bien voulu de moi, l’Ecole Centrale de Lyon. Cette école propose un cursus généraliste ce qui est un gros avantage pour explorer les différentes voies possibles dans l’ingénierie. Je me suis ainsi rendu compte que j’aimais bien la Mécanique et la Science des Matériaux donc j’ai construit mon parcours en ce sens et j’ai finalement été diplômé en 2019.
L’histoire aurait dû s’arrêter là mais je me suis retrouvé confronté au problème de sortir d’une école généraliste : c’est très difficile d’accéder à des postes plus techniques en R&D, car en compétition directe avec plein d’autres personnes issues d’école plus spécialisée et donc plus compétentes que moi. La thèse s’est dont imposée à moi comme un potentiel moyen de pallier cet écart. Je pensais ainsi réaliser une thèse CIFRE pour allier le meilleur des deux mondes (entreprise et recherche) mais le COVID en a décidé autrement et je me suis finalement retrouvé embarqué dans une thèse académique.
Bref, pour quelqu’un qui voulait juste être ingénieur R&D en entreprise, j’ai un peu glissé.
Qu’est-ce que la thèse t’a apporté ?
Déjà, ça m’a effectivement permis de pallier ce déficit technique. D’un point de vue des connaissances/compétences, j’ai beaucoup appris sur la structure et le comportement des matériaux, sur la façon de réaliser des essais expérimentaux, sur les moyens de simulations numériques et pleins d’autres choses très spécifiques à mon sujet de thèse.
Le doctorat c’est aussi et surtout beaucoup de soft skills comme l’autonomie (parce qu’on est quand même bien tout seul sur son sujet malgré l’équipe qui nous entoure), la gestion du temps et du matériel (gérer les usinages des éprouvettes, planifier les campagnes d’essais sur les machines, savoir trouver les bonnes personnes au bon moment, etc.) ou encore l’art de retranscrire ses résultats (autant à l’écrit dans des articles qu’à l’oral via des présentations en conférence).
Mais, si je ne devais retenir qu’une chose de ma thèse, ce serait cette porte ouverte vers l’enseignement. Comme beaucoup, j’ai pu donner des cours en tant que vacataire et ça a réveillé en moi une vraie vocation pour la transmission. Ce qui a complètement changé mon plan qui était de repartir en R&D en entreprise à l’issue de ma thèse pour finalement décider de poursuivre dans la voie académique pour devenir (un jour je l’espère) enseignant-chercheur.
Comment as-tu concilier vie pro et vie perso ?
Ce fut étonnamment assez simple. Après deux ans de prépa à ne faire que réviser et trois ans d’école à faire beaucoup d’associatif, je me suis paradoxalement retrouvé avec beaucoup de temps libre en arrivant en thèse, bien loin de la conception fantasmée des chercheureuses qui dédient leur vie à la science.
Tout est question d’équilibre avec soi-même. Il faut savoir trouver le rythme qui nous correspond. Pour ma part, étant plutôt du matin, j’arrivais à 8h et repartais à 17h tous les jours (avec de très rares exceptions qui étaient surtout dû aux horaires d’enseignement), ce qui faisait du 40h par semaine, pas trop mal quand on sait que j’étais payé 35h. Ce qui m’a d’ailleurs valu un bon paquet de fois de me faire traiter de « fonctionnaire » par mon directeur de thèse quand je refusais de lui répondre au téléphone ou de faire des points avec lui après 17h. Et règle d’or absolue : je n’emportais jamais mon PC chez moi, comme ça la distinction était nette dans ma vie comme dans ma tête. Pareil pour les vacances, déconnexion totale à chaque fois. La seule exception a été faite à la fermeture du laboratoire à la fin de ma troisième année pendant laquelle je rédigeais mon manuscrit (mais je pense que c’est le cas de tout le monde).
Et maintenant ? C’est quoi l’après-thèse pour toi ?
Après mon contrat de thèse, j’ai fait une année en tant qu’Attaché Temporaire d’Enseignement et de Recherche dans le même laboratoire, ce qui m’a permis de préparer ma soutenance sans être au chômage mais surtout d’étoffer mon CV académique en faisant beaucoup d’enseignement (TD et TP) et en écrivant un deuxième article sur mes résultats.
Aujourd’hui je suis en postdoc au laboratoire MatéIS sur un sujet plus Matériaux que Mécanique par rapport à ma thèse ce qui élargit pas mal mes horizons pour mon plus grand plaisir. En parallèle, je cherche toujours un poste de maître de conférences (on croise les doigts).