Merci beaucoup d'avoir accepté l'interview.
Pourriez-vous présenter votre parcours et ce qui vous a conduit à faire une thèse ?
J’ai toujours voulu travailler dans le domaine spatial: c’est pourquoi, à l’issue de mes deux années en classe préparatoire, j’ai intégré la dernière promotion de l’ENSICA, qui fusionnera pendant mes études avec l’ISAE-Supaero. Après deux années d’école d’ingénieur à Toulouse, j’ai rejoint le Master of Science “Space Flight - Space Exploration” à l’Université de TU Delft. C’est ici que j’ai aussi pu me tourner vers le domaine de l'astrophysique et l’instrumentation, notamment grâce à un stage au CEA-Saclay, des cours d’astronomie à l’Université de Leiden et une thèse de master à l’Université de Leiden sur l’un des instruments de l’Extremely Large Telescope. Cela m’a aussi permis d’étudier dans un environnement international, avec une méthode de travail complémentaire de la méthode française.
Dans la continuité de mes études, j’ai postulé à une thèse financée par le CNES et l’Université Paul Sabatier portant sur la détection des sursauts gammas et l’étude des performances de l’instrument ECLAIRs. Cette thèse m’a permis de participer à la mission SVOM, programme spatial franco/chinois. J’ai ainsi suivi la campagne de tests du modèle de vol de l’instrument, élaboré des logiciels d’analyse et de traitement des données et contribué à l’exploitation scientifique des résultats.
Quel poste occupez-vous aujourd’hui et comment votre doctorat vous sert-il au quotidien ?
Je suis Responsable Mission à U-Space, une PME qui conçoit et construit des nanosatellites de haute technologie. Mon travail consiste à faire la traduction technique du besoin exprimé par nos clients et superviser sa réalisation à travers nos produits, permettant de répondre au mieux aux exigences de performances. Le traitement des données d’un instrument spatial et leur utilisation font appel à des savoirs transverses; savoirs que j’ai pu acquérir pendant ma thèse, bien que l’astrophysique et les thématiques des missions de nos clients soient parfois différentes. Avoir fait une thèse a aussi renforcé ma capacité à m’approprier de nouveaux sujets, en acquérant rapidement de nouvelles connaissances et en étant capable d’approfondir au besoin. Pour finir, le doctorat permet aussi de développer des qualités personnelles telles que l’esprit de synthèse, l’esprit critique, la pédagogie; qualités qui sont pour moi essentielles dans mon poste d’ingénieur système.
Chez U-Space, je suis aussi responsable de la conception d’un instrument optique. Là encore, ma participation à la campagne de test de l’instrument ECLAIRs me permet d’avoir la bonne méthodologie: synthétiser les avis d’experts, se plonger dans la littérature technique et scientifique, développer des scripts pour analyser les données ou valider l’adéquation entre les performances mission demandées et celles simulées / mesurées.
Quels sont les conseils que vous donneriez à un étudiant / une étudiante souhaitant se lancer dans une thèse ?
J’ai eu énormément de chance avec ma thèse: j’ai travaillé sur un sujet passionnant, au sein d’une collaboration scientifique riche, à un moment charnière de la mission SVOM, le tout encadré par un directeur de thèse brillant, passionné et à l’écoute. J’ai vécu ma thèse comme une parenthèse professionnelle dans un domaine qui m’a toujours fait rêvé, parenthèse au cours de laquelle j’ai développé de nombreuses compétences. Malheureusement, toutes les thèses ne sont pas aussi idéales. Des défauts dans l’encadrement, le sujet, la collaboration peuvent entraîner une baisse de motivation pour l’étudiant, et la thèse peut très vite devenir un cauchemar.
Mon premier conseil pour un étudiant / une étudiante souhaitant se lancer dans l’aventure, c’est donc d’être très précautionneux lors de l’élaboration du projet de thèse. Il faut trouver un juste milieu entre la qualité de l’encadrement, le sujet de thèse et la renommée du laboratoire et/ou du directeur (de la directrice) de recherche. Cependant, à mon sens, l’encadrement doit être le critère ayant le plus de poids dans cette réflexion. Un bon encadrement permettra au candidat de s’épanouir dans son sujet, de prendre des directions de recherche différentes de celles qui auraient pu être envisagées à la base, mais aussi de s’ouvrir en confiance sur ses difficultés rencontrées dans ces trois années.
Mon second conseil serait de faire un sujet de thèse qui vous intéresse, sans vous soucier si le sujet est réellement en adéquation avec le marché du travail. Bien qu’encore peu valorisée en France si l’on compare par rapport à l’étranger, la thèse gagne de plus en plus de crédit auprès des entreprises. Même des thèses très théoriques en cosmologie ou physique fondamentale permettent de développer des compétences utiles dans le monde de l’industrie, comme la programmation, la capacité de rédaction de documents techniques, l’anglais. Je connais des étudiants en thèse qui ont trouvé un travail qui leur plaît avant même leur soutenance, alors qu’ils travaillaient sur les filaments de gaz dans les pouponnières d’étoiles, la morphologie des galaxies situées aux confins de l’Univers ou encore la caractérisation de l’atmosphère d’exoplanètes. Je connais d’autres étudiants qui sont restés dans le monde de la recherche, qui voyagent aux quatre coins du monde et continuent d’apprendre en espérant un jour décrocher un poste permanent de chercheur. Dans les deux cas, la thèse est l’opportunité de passer 3 années à apprendre et progresser dans un domaine qui vous passionne, sans le poids des responsabilités que vous porterez dans votre future carrière. Profitez-en !
Découvrez U-Space, une entreprise qui ambitionne de devenir leader européen sur les constellations de nanosatellites.
Portrait d'entreprise qui emploie des PhD, publié sur ce Blog.