Merci beaucoup d'avoir accepté l'interview.
Peux-tu nous parler de ton parcours académique ?
Mon parcours académique débute avec mes études d'ingénierie électronique à l'Université de Cagliari, en Italie, où j'ai acquis une solide formation technique et scientifique. Durant ces années, j’ai développé un intérêt particulier pour les applications de l'électronique dans le domaine spatial, ce qui m’a amené à rechercher un stage qui pourrait combiner ces deux aspects. Grâce à une bourse Erasmus, j’ai pu rejoindre le CNES à Toulouse, où j’ai travaillé sur un projet portant sur la fiabilité des photodétecteurs utilisés dans les systèmes spatiaux.
Ce stage a été un tournant majeur dans ma carrière, car il m’a non seulement permis d’acquérir des compétences techniques spécifiques dans des domaines de pointe, mais aussi de me familiariser avec l’environnement de recherche appliquée à un niveau international. C’est également à ce moment-là que j’ai commencé à bâtir des relations avec des chercheurs et ingénieurs du CNES, des liens qui se sont avérés cruciaux pour la suite de mon parcours.
Pourquoi as-tu décidé de faire une thèse ?
Ma décision de faire une thèse est venue de deux facteurs clés. Tout d'abord, vers la fin de mes études en ingénierie électronique en Sardaigne, j’ai pris conscience de la faiblesse du tissu économique dans la région, notamment en matière d'innovation dans le secteur de l'électronique. Les entreprises étaient rares et l'environnement professionnel manquait d'opportunités intéressantes dans le domaine de la recherche et développement, surtout en électronique. Il n’y avait pas de structure forte de soutien à la recherche publique, et l'absence d’options concrètes dans ma région m'a poussé à chercher des opportunités ailleurs.
Dans ce contexte, j’ai décidé de me tourner vers le nord de l’Italie et l’étranger pour trouver un environnement plus dynamique. Cependant, au moment de chercher un emploi, la possibilité d’entreprendre une thèse a émergé comme une voie plus attractive. Le projet de recherche proposé pour la thèse était très concret et applicatif, ce qui m'attirait plus que la recherche fondamentale, pour laquelle je ne me sentais pas pleinement préparé ni motivé. La thèse me permettait de continuer dans une voie technique, en travaillant sur des applications spatiales concrètes, avec un impact direct sur les technologies de demain, tout en bénéficiant de l'expertise du CNES.
Ainsi, la thèse a été pour moi une manière de répondre à la fois à un manque d'opportunités professionnelles dans ma région et à un désir de me concentrer sur un domaine de recherche très appliqué, en lien direct avec l'innovation technologique, ce qui était pour moi plus stimulant et pertinent à ce moment-là.
Peux-tu expliquer brièvement ta thèse ?
Ma thèse portait sur la fiabilité des phototransistors utilisés dans les codeurs optiques pour le contrôle d'attitude des satellites dans le cadre du projet Pléiades, un programme d'observation de la Terre. J'ai développé un modèle statistique pour prédire la dégradation de ces composants sous irradiation, en fonction des types de mission spatiale et du niveau de protection nécessaire. Ce travail comprenait plusieurs tests d'irradiation pour valider ces modèles et permettre le développement de composants plus résistants aux radiations, tout en proposant des méthodes de qualification plus efficaces pour différentes missions spatiales.
Quelles compétences importantes as-tu acquises au cours de ta thèse ?
Pendant la thèse, j'ai acquis des compétences techniques très spécifiques, notamment dans la manipulation d'outils de mesure avancés en électronique et optoélectronique, ce qui m'a permis de maîtriser des aspects pratiques cruciaux pour la recherche. Mais au-delà des compétences techniques, j'ai développé une grande confiance en moi. J'ai appris à présenter mes travaux de manière claire et convaincante, même sous pression, lors de conférences internationales ou de discussions scientifiques. La thèse m'a aussi permis de mieux gérer le stress et de structurer mes idées de façon à pouvoir surmonter les moments de doute et de fatigue.
Quelles ont été les difficultés majeures que tu as rencontrées ?
Une des plus grandes difficultés a été liée au financement. Pour obtenir ma bourse de thèse, j'ai dû affronter la bureaucratie italienne, souvent inefficace et mal informée. Après avoir déposé mon dossier, j'ai dû attendre six mois pour obtenir une réponse officieuse, alors que j'avais prévu une réponse en trois ou quatre mois. Néanmoins, pour ne pas perdre une année entière, j'ai décidé de commencer la thèse à mes propres frais. Le financement officiel n'est arrivé que quatre mois plus tard, et j'ai dû convaincre l'administration universitaire française d'accepter cette situation provisoire. Ce fut un défi, mais je tenais à ne pas retarder mes recherches. Les difficultés étaient initialement liées aux problèmes de financement, comme expliqué, mais à la fin, elles sont devenues davantage de nature personnelle, liées à la nécessité de rester concentré sur la rédaction du manuscrit de thèse, étant donné que la partie expérimentale, plus motivante, était déjà terminée. Pendant la thèse, il n'y a pas eu de difficultés particulières, à l'exception de celles inhérentes à la recherche scientifique, comme l'absence de résultats, les retards dans les livraisons d'instruments, ou la rupture d'équipements, mais ce sont des situations qui font partie du jeu.
Quels conseils donnerais-tu à quelqu'un qui envisage de faire une thèse ?
Je pense qu'il est essentiel d'avoir une forte curiosité scientifique et une réelle envie de résoudre des problèmes complexes. Une thèse est un engagement long et difficile, il faut donc être organisé et persévérant. La motivation fluctue souvent au cours de la thèse, et il y a des périodes où les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes. Cependant, il est crucial de rester concentré et de garder à l'esprit les objectifs à long terme. Je conseillerais aussi de choisir un sujet qui vous passionne vraiment, car cette passion sera le moteur qui vous poussera à aller au bout malgré les difficultés. Enfin, un bon encadrement et une équipe de soutien solide peuvent faire toute la différence dans la réussite d'une thèse.
En quoi cette thèse a-t-elle influencé ton parcours professionnel ?
Cette thèse a été un tournant majeur dans mon parcours professionnel. Non seulement elle m'a permis de développer des compétences techniques de pointe, mais elle m'a aussi offert une perspective unique sur la fiabilité des composants dans des applications critiques comme les missions spatiales. Elle a renforcé ma capacité à mener des recherches appliquées et à résoudre des problèmes concrets, ce qui m'a permis de me positionner dans des secteurs de haute technologie. Après ma thèse, j'ai pu travailler sur des projets complexes, notamment dans le domaine de l'aérospatiale et de l'électronique, où les défis en matière de fiabilité et de durabilité sont omniprésents. La thèse m'a aussi appris à naviguer dans des environnements de travail où l'innovation est primordiale, et m'a donné la confiance nécessaire pour prendre des initiatives dans ma carrière professionnelle.
Comment es-tu arrivé à prendre la direction d'une entreprise ?
Après ma thèse, j'ai eu l'opportunité de rejoindre Intraspec, une PME spécialisée dans l'analyse de la fiabilité des composants électroniques. L'entreprise étant en pleine croissance et confrontée à des défis liés à l'innovation et à la gestion des projets, j'ai été progressivement impliqué dans la direction de certaines activités et projets stratégiques. Ce rôle m'a permis de développer des compétences en gestion d'entreprise tout en continuant à utiliser mes compétences techniques. J'ai appris à combiner mon expertise scientifique avec la gestion d'une équipe et la prise de décisions stratégiques pour guider l'entreprise dans sa croissance.
Que signifie travailler dans une PME ?
Travailler dans une PME implique une grande polyvalence et une proximité avec l'ensemble des opérations. Contrairement à une grande entreprise où les rôles sont souvent plus spécialisés, dans une PME, on porte plusieurs casquettes. Cela exige une gestion dynamique et une capacité à prendre des décisions rapidement. La responsabilité est plus grande car chaque action peut avoir un impact direct sur l'entreprise. C'est aussi un environnement où l'innovation est clé, car les PME doivent souvent être plus agiles pour répondre aux besoins du marché. Mais il y a aussi des avantages : la proximité avec les autres membres de l'équipe, une meilleure compréhension des différentes facettes du fonctionnement de l'entreprise, et la possibilité d'avoir un impact significatif sur son développement.